dimanche 8 juillet 2007


LE LAC

Dans son écrin de forêt, le lac est lové. Son eau paisible renvoie le reflet des arbres aux feuillages sombres et parfois, le vol paisible d'oiseaux noirs. Pas un pli, pas une ride à la surface vert argenté. D'épais nuages le couvrent d'une brume songeuse.

La barque touche la surface du lac et dessine des lignes plus claires tout autour d'elle. Le petit bateau frêle avance sans bruit. Les rames se dressent, plongent, nagent et se redressent et une bruine fine caresse nos joues. Une main s'attarde dans l'étoffe de l'eau. Elle est délicieusement fraîche et le soir parfume l'air de ses nébulosités odorantes.


Le lac s'étire. Sur ses berges, on devine de petits sentiers qui, rendus à l'état sauvage, courent et sautent entre les arbres. On devine aussi de jolis chalets de bois brun, assis confortablement et devisant à mi mots, de petits jardins parfois, aux pelouses rases, des cheminées exhalant leur fumée légère dans l'air figé. Et, de loin en loin, des barques retournées sur les rives, et des pontons en bois, comme autant de bras tendus vers le lac, comme autant d'étreintes imperturbables et suspendues dans leur hâte.


La barque glisse de clapotis en clapotis. Les rames, sans s'émouvoir, fendent l'eau d'un rythme régulier. Le lac nous happe. En son milieu, le miroir est étrange et les arbres de la rive gauche semblent toucher les arbres de la rive droite, forêt irréelle, forêt aquatique à travers les branches de laquelle vont nicher des poissons de vif argent.


Des rires d'enfants parviennent jusqu'à nous, étouffés, disparus déjà, impression que le rêve nous a saisis. La barque s'approche d'un ponton dansant sans se presser. Elle s'y accote doucement. Elle est délestée de ses paquets et portée sur le rivage. L'heure est à la paix.


De gros nuages duveteux s'amoncellent maintenant au dessus du lac, comme la chevelure volage d'un vieillard. Le chalet ouvre ses portes sur son foyer chaleureux mais le lac ensorcelle, déjoue les artifices de la petite maison sylvestre. Assis sur le ponton, nous regardons en silence les kyrielles de petites fées qui valsent au dessus de l'eau. Parfois, elles touchent délicatement la surface lisse et laissent une empreinte ronde qui va en grandissant. Le soir couvre le lac et ses abords d'une couverture frangée de bleu et de gris. La quiétude est juste troublée par le crépitement d'un feu de bois près du chalet. Près du feu, on distingue les ombres mouvantes d'un groupe d'amis, les sourires complices d'une guitare. Mais sur le ponton, tout près de l'eau, tout nous vient assourdi, lointain, et la rêverie nous presse contre son coeur. Quelques gouttes de pluie annoncent l'averse prochaine. Mais avant de rentrer, l'âme embrasse le lac constellé de pampilles brillantes. Le bal des fées peut à présent commencer...

3 commentaires:

Unknown a dit…

Il n'y a pas de lac chez moi, l'eau n'est que trés rarement calme et la brûme ne fait pas souvent partie du décor. Je me suis régalée à te lire, j'ai senti cette fraicheur du lac, puis la chaleur d'un feu en bordure... je ferme les yeux et les fées apparaissent...
Merci !

Soleildoctobre a dit…

Hélas, chez moi, il n'y en a pas non plus... Je me rappelle juste du beau pays de mon mari où l'on compte un lac par habitant...
Merci à toi...

Unknown a dit…

Décidément, dans tes descriptions, les inanimés semblent doués de vie, ont des intentions, des pensées, une volonté propre, et le tout forme un monde harmonieux.
La seule allusion à une présence humaine n'est qu'un détail et la nature est reine. Mais pas n'importe quelle nature, la tienne, une nature féérique.
Malgré l'esprit lettré de mes analyses (déformation passionnelle) c'est d'abord un plaisir de te lire.