jeudi 11 septembre 2008

Le baiser

Donne-moi un baiser, insuffle-moi l'amour.
Laisse filer le temps, que le sol se dérobe,
Tes mains dans mes cheveux valent bien les détours
des rubans nuageux brodés sur mon coeur d'aube.

Donne-moi un baiser, nos lèvres en suspens
Toutes proches déjà, déjà une promesse...
Douce chaleur frôlée, le regard se repend
D'avoir voulu voler cette intime caresse.

Donne-moi un baiser, ton coeur contre le mien,
Nos langues danseront leur doux ballet magique,
Et un frisson ému resserrera le lien
Et la célébration des noces féeriques.

Donne-moi un baiser, mélange nos plaisirs.
Oh, laisse-moi goûter à cette douce ivresse
Qui naît et se brise au ressac de nos désirs.
Donne-moi un baiser, donne-moi ta tendresse.

Donne-moi, donne-moi un baiser feu et or ,
Oublie tout, oublions le monde et ses vestales.
Embrasse-moi encore et serre-moi plus fort
Car tout est dit là où le silence s'installe...

jeudi 12 juin 2008

LA MAISON DE REVE





Mardi 5 décembre

Cher journal,



voilà des lustres que je n’ai pas discuté avec toi ! Il faut dire que j’ai été passablement occupée ces derniers temps mais pourtant, rien qui ne vaille la peine d’être mentionné entre tes pages. Aujourd’hui cependant est un grand jour. La propriétaire de la maison que nous louons est venue nous rendre visite. Et imagine un peu… On va devenir propriétaires ! On va avoir notre maison ! A nous tous seuls ! On va pouvoir abattre les murs si on veut, tout badigeonner en rouge et bleu, fixer la table au plafond si ça nous tente ! Si tu savais comme on jubile, comme on est excité !





Jeudi 7 décembre

Connais-tu l’expression « parcours du combattant » ?
Et bien nous, nous savons ce que cela signifie en long en large et en travers ! Je commence à me demander si les vieux n’avaient pas raison de cacher leur bas de laine sous un pied de leur lit !
Les banques… Ah ! Les banques !!! Je crois qu’avant la fin de cette histoire, je vais pouvoir rédiger une étude sociologique sur les us et coutumes des banques !!
Pour l’instant, voici mes réflexions personnelles :
- Tout d’abord, on trouve les banquiers mielleux. Ils se caractérisent par une souplesse et une agilité déconcertante qui leur permet entre autres, de pratiquer la courbette avec grâce.
- Ensuite, il y a les réticents, qui sont passés maîtres es bonnes manières et qui sont capables de noyer le poisson de leur refus sous un amas gluant de verbiages oiseux.
- On peut aussi avoir à faire avec des expéditifs, des pressés, bref, des personnes hautement importantes qui vous font comprendre que vous n’êtes qu’un minuscule éventuel client parmi un flot d’autres autrement plus importants et plus intéressants.
- Enfin, on a eu le loisir de rencontrer un spécimen tout à fait rare de « biche aux abois ». Cette fois-là, ce fut particulièrement épique car la conseillère en question se faisait inspecter et c’est une femme pantelante, tremblante et bégayante qui nous reçut. Bien sûr, à quoi penses-tu ? Nous avons eu grandement pitié de cette pauvresse ! Mais passées les 1H15 de balbutiements, notre seuil de tolérance fut largement dépassé ! Incapable de répondre à nos questions, elle finit par nous expliquer que sa banque « pourrait » nous prêter la somme qu’il nous fallait mais qu’elle ne « préférait pas qu’on le demande ». Sic !

Finalement, tous sont unanimes : nous pourrions acheter un château si nous le désirions. « Tout va très bien, Madame la Marquise » aurais-je pu chanter, le cœur en joie, une fois les entretiens passés. Et je me voyais déjà châtelaine dans mon domaine !!



Samedi 9 décembre

Nous avons choisi notre banque ! La conseillère est toute jeune, dynamique, pleine d’allant, c’est sûr, ça va bien se passer entre nous !
Lundi, nous avons rendez-vous avec les propriétaires de notre maison à 18h pour s’entendre sur le prix définitif. J’espère que tout va bien se passer car ils sont en instance de divorce et ne se supportent plus. Je pense que ça va être joyeux !!

Lundi 11 décembre
20h
Bon… L’entretien a été… enrichissant… Que je te raconte un peu…
Le monsieur arrive en premier comme une tornade. Soupe à la grimace et verbe haut. Ouh la la !! Monsieur nous hurle qu’il ne désire pas vendre, que c’est une idée de sa future ex femme qui n’a aucun sens du négoce et se fourvoie en vendant ce qui représente pour lui une rente.
J’enjolive un peu, là, tu l’imagines. Ca donnait plutôt : « T’façon, elle est gentille mais elle comprend rien. Moi, la maison, je la vendrais avec vous à l’intérieur parce que vous payez bien. Là, on en tirerait un bon prix. » Nous voilà transformés en marchandises !! Concept intéressant !!
Puis la dame arrive. Et là, la guerre est déclarée. L'homme lui crie ouvertement dessus, devant nous. Il ne lésine pas sur les critiques et nous nous sentons mal à l'aise car cela ne devrait pas avoir lui en notre présence. Il lui explique qu'ils n'ont pas acheté cette maison depuis assez longtemps et qu'avec la plus-value, elle n'en tirera pas un assez bon prix pour racheter quelque chose à sa convenance pour elle et leur fils. Le ton monte. La dame ne veut pas nous chasser. Elle estime que son malheur ne doit pas déteindre sur les autres. L'homme cède. Il faut s'entendre sur le prix.
Nous voilà à présent marchands de tapis. Et apparemment, l’autre est meilleur que nous à ce petit jeu ! Il nous propose des choses abracadabrantes dans lesquelles je retiens le prix de la maison plus les mois de caution, ou encore la moitié du prix en dessous de table. Nous insistons, le toit est à refaire et le prix qu’ils demandent trop élevé. Nous finissons par trouver un terrain d’entente avant que tout le monde ne sorte les colts et nous nous serrons la main. Les propriétaires demandent que l’on s’occupe de trouver un notaire ce à quoi nous nous engageons.
Et bien voilà, les propriétaires sont partis et nous avons l'impression d'avoir remporté la guerre. Nous avons trinqué à notre future acquisition en nous disant que cette fois, nous ne serons plus des nomades.



Mardi 12 décembre
11h


L'euphorie aura été de courte durée. Moins de 15h après notre accord verbal, la propriétaire a rappelé pour se désister. Elle a appelé son notaire pour demander des renseignements sur ce que lui avait dit son mari. Or, il s'avère qu'il est vrai qu'elle ne tirerait pas assez d'apport personnel pour racheter un autre bien où s'installer avec son fils. Elle a signifié que nous avions jusqu'au 30 août pour déménager et lui rendre les clés afin qu'elle aménage à notre place.
Je suis furieuse ! Cette… Grr ! enquiquineuse ne pouvait-elle pas aller se renseigner avant de nous faire cette offre de gascon ? Parlons-en de gascon ! Elle a de la chance que je ne sois pas un Cyrano car elle aurait eu à se faire du souci !



15h
Bah… Cette maison ou une autre, finalement… Celle-là était bien parce que l’on y vivait dedans ! Mais en fait… elle n’est pas si grande et il y pleut à l’intérieur. C’est peut-être un mal pour un bien… Et puis les banques nous ont bien dit qu’il n’y avait aucun problème pour acheter un bien immobilier alors pourquoi se lamenter ! A nous la chasse à la perle rare ! A nous les agences immobilières ! A nous les visites !!!



Mardi 19 décembre


Nous avons adopté un nouveau sport : la course aux agences ! Quel équipement est-il nécessaire d’avoir : de bonnes chaussures, un cœur bien accroché, surtout pas une jupe et de l’endurance !Depuis la mauvaise nouvelle le planning est serré : on va au travail, on en en sort, on se rejoint à la maison et on part en virée visiter des maisons ! Dès que l'on franchit le seuil d'une agence, on se sent comme des proies potentielles. Mais il suffit que l'on dise ce que l'on recherche... et surtout notre budget et c'est alors le ballet des pleureuses grecques : "Vous n'y pensez pas, c'est absolument impossible, il faut changer de projet..." Tout de suite après, cependant, les agents cherchent à nous faire visiter des maisons. Et là, c'est plutôt drôle car cela va de la boîte vide où tout est à faire du sol au plafond, à la maison aux chambres passantes - comprenez qu'il faut passer par la chambre A pour accéder à la chambre B-, de la maison hors budget à celle qui n'a plus qu'un escalier en colimaçon fixé par des sangles et des étais et qui jointe avec le plancher à l'aide d'une porte retournée. Le moral oscille entre l'excitation et le désespoir de trouver notre petit nid.


Demain, 'ti mari va visiter une dernière maison... On verra bien si on s'accroche à notre projet ou si on se trouve dare-dare un mobil-home à louer... ou une tente... une grotte?



Mercredi 20 décembre


Un miracle s’est produit, de ceux qui donnent envie de croire au père noël, à la petite souris et à la fée Clochette! La maison que ‘ti mari a visité semble répondre à tous nos critères ! Il m’a griffonné un plan succinct sur un bloc-notes, me l’a décrite de long en large ; Aurait-on trouvé notre perle rare ??? Je le saurais bientôt puisqu’on la revisite ensemble le 4 janvier. Je trépigne d’impatience !!

Vendredi 4 janvier

20h

C'est celle-là, c'est celle-là! Il y a tout ce dont on rêvait et même plus! Il y a de grandes fenêtres et de belles cheminées. Elles sont pour l'instant bouchées mais c'est un détail. Et c'est grand! Il est vrai qu'il va falloir aménager les étages et que ça va représenter un gros travail mais qu'importe! Il y a des tomettes dans les escaliers et des nez de marche en bois comme chez mes arrière grands-parents! Il y a une jolie cour intérieure où roucoulent des pigeons, un grand garage et même une superbe cave toute voûtée. Et au quatrième étage, il y a même une pièce qui ferait un charmant petit atelier d'artiste. Il y a quelque chose de bohème dans cette pièce-là : la vue sublime sur les toits, peut-être. J'y vois déjà des rangées de livres, un petit bureau pour écrire, pourquoi pas un chevalet...

C'est la maison de nos rêves! Je le crois fermement!!

Samedi 5 janvier

Il ne faut pas perdre de temps! Il ne faudrait pas que quelqu'un achète notre maison! J'ai contacté la conseillère de la banque sur laquelle j'ai jeté mon dévolu. Bon... Ell parle de difficultés qu'elle n'avait pas évoquées la dernière fois mais, bah, ça ne peut être que de petits détails!! Cette semaine, je réunis toutes mes économies pour payer le compromis de vente! C'est exactement le montant de ce que je possède! Si c'est pas un signe, ça! Il va falloir un petit temps pour débloquer mes sous mais tout va rouler, je le sens!!

Lundi 21 janvier

Rappelle-moi de ne plus jamais me fier à mes intuitions... L'agence immobilière a appelé et nous a annoncé piteusement que la maison était déjà sous compromis. Le propriétaire l'a promise à un de ses amis hors agence... C'est comme si le sol s'écroulait sous nos pieds. Non, pire! Comme si on avait pris une pelle pour s'enterrer nous mêmes...

Mais a-t-on le choix? On a perdu trop de temps à se projeter dans cette maison, il faut qu'on reprenne les investigations et vite!! Je vais rappeler les agences, regarder les annonces sur internet... Ce sera bien le diable si je ne trouve pas!

Dimanche 27 janvier

Ca, c'est bizarre... A chaque fois que je fais des recherches sur internet pour trouver des petites annonces, je tombe sur l'annonce de la maison qu'on voulait acheter... Ce qui est étrange, c'est que, normalement, il y a écrit en travers "sous compromis" mais quel que soit le site sur lequel je vois l'annonce, il n'y a rien de mentionné. 'Ti mari a dit qu'il appelerait demain.

Lundi 28 janvier

'Ti mari vient de m'appeler pour m'annoncer la bonne nouvelle! Quand il a contacté l'agence, la fille lui a répondu qu'elle ne savait pas bien, tout en balbutiant, s'excusant, ne sachant que dire alors elle a fini par proposer de se renseigner. Quelques heures plus tard, ele l'a rappelé pour lui direque le compromis de vente passé par le propriétaire avait été cassé et que la maison était à nouveau en vente. Plus rien ne nous arrête. Nous avons pris rendez-vous chez un notaire. Date est prise pour le 8 février, 9h, ouh ouh ouh!!!

Vendredi 8 février

On a signé le compromis! On a signé le compromis! On a signé le compromis! A présent, on a jusqu'au 30 avril pour signer la vente. Va falloir bouger la banque maintenant!

Mardi 12 février

Bouh, qu’elle est pas sympa, cette fille ! La voilà qui grince des dents pour le budget. Le dossier est monté. En fait, euh, non… Elle nous a demandé une masse de documents susceptible de recouvrir intégralement les murs de notre future demeure ! Je me suis engagée à les lui fournir dès que les obtiendrais.



Vendredi 22 février

Ca y est, j’ai tout ! Je vais voir Sœur Sourire pour lui donner les documents : pièces d’identité (fastoche !), trois dernières fiches de paie, trois derniers relevés bancaires (tout par trois comme la Sainte Trinité ! Je ne savais pas que cette banque était catho !!)… On est bon, là ! La balle est dans le camp de Madame la conseillère. On y croit !

Lundi 3 mars

Inspire – Expire – Inspire – Expire…
Je vais lui faire sa fête ! Je vais lui… Je vais lui… Oh, je ne sais pas ce que je vais lui faire mais elle ne va pas s’en tirer comme ça !!
Madame la banquière a été malade. Et bien sûr tous ses dossiers sont restés en stand by.
Mais attends, ce n’est pas tout !! Ensuite, elle est partie en vacances ! UNE semaine ! Toute une semaine ! Et moi, pendant ce temps ? Et bien je me ronge les sangs, les ongles et même les os ! Si, si ! Et pourquoi me diras-tu ??? Parce que le 8, je dois donner au notaire l’accord de prêt et que je n’ai rien, niet, nada ! qui prouve que la-banque-en-passe-de-devenir-ma-banque-favorite me connaît seulement ! Et qui on appelle en boucle ! Moi, moi, moi ! Et L’agent immobilier. Et le notaire. Et l’agent. Et le notaire. Je vais devenir zinzin. Je suis zinzin. Je me suis mise à harceler Madame la Performante de la Banque. Et tu connais la dernière ? A présent c’est sa supérieure qui s’est carapatée en vacances et personne d’autre qu’elle ne peut donner l’accord de principe. Je crois que je suis entrée dans la quatrième dimension !!

Vendredi 7 mars

Super. On a eu l’accord de principe. Pas l’accord de prêt, hein, non, l’accord de principe ! En gros, la banque est d’accord « sur le principe » mais elle doit à présent analyser les petites lignes de nos comptes en banque respectifs.
Quand je pense qu’à la télé, les pubs disent que l’on a cet accord de principe en 48h et qu’il nous aura fallu près de… 48 jours !
Le pire, c’est que je me suis présentée toute contente aux portes de l’agence immobilière avec mon sésame bancaire et qu’elle a bondi quand elle a vu que je ne lui rapportais que cet accord de principe…
Bref. On est hors délai. A partir de maintenant, si le propriétaire trouve que c’est trop long, il peut se rétracter et garder notre apport. C’est pas la fête, ça ??
Vous m’amènerez des oranges, hein, si je flanche et que je fais avaler par les narines le dossier de banque à Sœur Sourire ???Mardi 11 mars

Suis allée voir Sœur Sourire.



Mercredi 12 mars

Suis allée voir Sœur Sourire.



Jeudi 13 mars

Suis allée voir Sœur Sourire.



Vendredi 14 mars


Devine qui je suis allée voir aujourd’hui ??? Elle est en passe de devenir ma meilleure amie !!

Rassure-toi sur ma santé mentale, je n'y vais pas pour le plaisir. Mais cette fille est une sadique! Elle me fait signer des papiers le lundi. Et m'appelle en fin de journée pour me demander de passer le lendemain car elle s'est trompée de formulaire. (en fait, il s'avère que c'est le même, tout pareil, à part la couleur!!) Ensuite, elle commence à chipoter pour le pourcentage d'assurance de chacun des emprunteurs. Ca finira qu'elle gagne deux assurances à 100%. A croire qu'on lui a promis une commission!

Mardi 18 mars

Je pense sincèrement à présent que les banques obligent leurs employés à suivre des stages de harcèlement moral. A présent, on nous demande de passer une batterie de tests médicaux pour vérifier qu'on est en bonne santé : cholestérol, diabète, cancer, tension avant et après effort, poids, taille et état général de santé! Et la couleur de notre petite culotte!!

Tu me demandes mon âge, gentil journal??? Et bien nous avons tous les deux 30 ans!! Et oui, ils sont pointilleux!!

Quoi? Tu me demandes pour les délais de signature de la vente?? Oh oh... Hors délai, ma bonne dame, hors délais!!

Mercredi 19 mars

J'ai l'honneur de t'annoncer que nous allons bien! Le médecin nous a fait une attestation.

Jeudi 20 mars

Attestation envoyée par fax. Chouette... On avance, ouh la la!

Vendredi 21 mars

Voilà, c'est fait. Prise de sang en règle. Résultats ce soir. (**soupir**)

Ahhhhhhhhhhhhhhhhh! La banquière a appelé! ON A L'ACCORD DE PRET!!!!!!!! Quelle rapidité! Cela a été réglé avec la vélocité de l'antilope traquée!!

Lundi 24 mars

Mais bien sûr!! 'Ti mari est majoré par l'assurance de prêt! Vilain garçon, il est trop gros, et potentiellement à risques de maladies cardio-vasculaires! Euh, question : ils ont prévu l'assurance anti chute de satellites ou celle contre les risques d'être écrasé par un train qui a déraillé alors que tu pique-niquais au bord de la voie ferrée???

Vendredi 28 mars

Les clés de notre future maison, là, dans nos mains!! C'est fabuleux, irréel. Ne me réveillez pas!!

Lundi 31 mars

Non, mais c'est pas possible! Elle les pond les uns après les autres ou quoi! Soeur Sourire nous a demandé d'autres pièces justificatives! Puis alors, du costaud, du délirant! Juge toi-même :

a) la quittance de loyer de mars (bon, passe encore...)

b) l'attestation d'assurance de notre future maison (ce qui signifie qu'il faut que nous assurions une maison qui ne nous appartient pas encore!)

c) (tiens-toi bien!) une expertise de l'état général de la maison pour savoir si d'éventuels travaux et rénovations sont à prévoir.

Ben voyons! J'ai aussitôt appelé l'agence qui a eu la bonté de me dégoter un expert de ses amis qui va faire ses petites affaires d'expert le plus vite possible...

Mardi 1er avril

J'ai le rapport d'expertise!! Je l'aurais presque embrassé, cet expert! En plus, il a été sympa car il n'a rien signalé d'alarmant. Tout au plus un fil électrique dénudé qu'il faudra que lon mette sous goulotte! Cool, cool, cool!!! Zou, je file voir ma copine de la banque!

Vendredi 4 avril

Ce qu'il y a d'affreux avec les incapables, c'est qu'ils le sont de bout en bout. Le 4 avril, Mme B. alias Soeur Sourire m'appelle pour me demander un devis... pour les fils dénudés à mettre sous goulotte! Je m'insurge, c'est scandaleux, je ne vais pas demander à un électricien de venir pour ça! Je suis par ailleurs affolée car le 30 avril approche et rien n'est fait... Mme B. ne l'entend pas de cette oreille, elle me répond méchamment que de toute façon, on ne peut rien me dire, que je dramatise toujours tout, qu'elle n'y est pour rien et lorsque je lui demande de me comprendre, elle me rétorque qu'elle n'a pas à le faire et que puisque c'est comme ça... CLIC! Elle me raccroche au nez. En larmes, entre deux cours, j'appelle ma mère à la rescousse. Je travaille toute la journée et ne peux pas m'occuper de l'électricien. Ma mère appelle l'agence immobilière pour la tenir au courant et c'est ensemble qu'elles vont s'occuper du devis dérisoire que je porterais élégamment dans la journée, en évitant soigneusement de le faire manger avec une tonne de sauce piquante à ma banquière sans éducation.

Mercredi 9 avril

Miracle!!! C'est noël!! On a reçu les offres de prêt! Dans 11 jours, on envoie le tout et on en finit!!(une loi stupide de rétractation oblige les futurs propriétaires à attendre 11 jours incompressibles pour signer et renvoyer l'offre! Comme si nous n'avions pas eu le temps de réfléchir à l'étendue de nos actes jusque là!!!)

Vendredi 18 avril

Tu ne le croiras pas! Soeur Sourire a voulu nous rencontrer... pour nous aider à parapher chaque page de notre offre de prêt! Tu ne me crois pas, hein???

Lundi 21 avril

ENFIN! Les offres de prêt sont envoyées.

Le propriétaire accepte même, si l'on n'arrive pas à signer avant le 30 avril, que nous aménagions! Alors, je te laisse vite car je dois faire nos cartons, dérouter ligne téléphonique, courrier, internet et tout le toutim!!! "Tout est pour le mieux" dirait ce bon vieux Maître Pangloss!

Samedi 26 avril

Et ben non, tout compte fait, on ne déménage plus. J'ai dû rappeler tous les copains pour décommander. Pourquoi? Parce que Monssieur de la propriété grincheuse refuse finalement qu'on s'installe dans nos futurs pénates. C'est pas cool, ça? Quoi? Défaire les cartons et vivre dans une maison vide jusqu'au 2 mai, date de signature de la vente? Bah, ça a de bons côtés aussi, le camping! Lesquels?? Ah ah, cherche bien!!

Mardi 29 avril

Révélation! Monsieur le Propriétaire a refusé qu'on aménage car il avait oublié de faire faire l'expertise amiante-plomb-termites. Toutes ces surprises, c'est si merveilleux, ça donne du piquant à la vie!!

Mercredi 30 avril

Echéance de signature de vente. Elle passe.

Vendredi 2 mai

Nous voici enfin officiellement propriétaires!

Morale : Je vais emprunter une de celles de mon ami Jean DLF : "Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage". (Il paraît... J'aurais bien essayé cependant la force et la rage sur mon amie Soeur Sourire!!!)

vendredi 7 mars 2008

ANDRE


Il s’appelle André. C’est un ange. Il vient me chercher, chaque soir, à la porte du sommeil. En fait, il est peut-être simplement un passeur, un gardien du sommeil, je ne sais pas, je ne lui ai jamais demandé. Nous parlons peu, c’est vrai.
Chaque soir, quand ma tête se pose sur le frais oreiller, quand mes yeux se ferment, il est là, de lui-même. Je ne saurais pas vraiment dire à quoi il ressemble, son visage est brouillé, ses contours flous. Et lorsque je crois avoir enfin gravé ses traits dans ma mémoire, il m’est impossible de m’en souvenir le matin… Il se tient devant moi, me tend une main amie et, dans un froufrou d’ailes, nous partons.
La plupart du temps, nous nous réfugions un moment chez lui. Nous passons un moment sur le tapis, devant un grand feu de cheminée, même l’été lorsqu’on meurt de chaud et, étrangement, on n’a jamais trop chaud. Puis, lorsque nous sommes lassés, il m’emmène dans de grandes promenades.
Invariablement, nos balades débutent sur un chemin bordé de pommiers aux fruits rouges et lustrés. Puis nous passons une grande grille toujours ouverte. Ensuite, c’est l’aventure. André a beaucoup d’imagination. Une fois, il m’a confié des ailes de papillon et nous sommes allés voler au dessus de champs de nuages aux couleurs de barbapapa. Quelquefois, nous longeons le bord de mer pour regarder le soleil se noyer dans les vagues. Il y a eu cette fois aussi où il m’a fait visiter un joli petit village de carte postale où tout n’était que quiétude et paix. Mais le plus souvent, il m’accompagne dans une clairière merveilleuse que j’aime particulièrement. En son centre, on y trouve un lit niché au creux de quatre gros arbres courbés aux branches pleureuses. J’aime bien m’y endormir en observant le ballet féérique des lucioles et des étoiles entre les ramures protectrices. Ca sent le foin et la rosée, il n’y a pas de plus doux berceau.
Ce qui m’ennuie, c’est que je m’endors toujours avant le retour. Pas moyen de le remercier pour tant de rêve. Et je me réveille tous les matins dans mon lit après ma nuit de songes fous. Mais même si j’oublie tout pendant la journée, je sais que la nuit qui vient, la même magie s’opèrera.
Je ne sais pas vraiment comment il se nomme. Je l’ai appelé André car cela veut dire « l’homme » or, le fait qu’il ait l’apparence d’un homme est à peu près tout ce que je sais de lui… C’était une raison suffisante pour le baptiser ainsi.
Cette nuit, je compte bien me promener en forêt. Je suis certaine qu’il n’y verra pas d’objection… Cette fois, je penserai à bien observer son visage pour ne pas l’oublier et je lui demanderai quel est son véritable nom. Je ne serais pas étonnée s’il me disait que les Mortels l’appellent Morphée…

jeudi 28 février 2008

SERVICE MAGIQUE DES OBJETS TROUVES


Je ne sais pas comment je peux me débrouiller pour toujours égarer mes affaires ! « Un jour, tu oublieras ta barbe ! » me répétait sans cesse Cléia, ma petite fée, un sourire malicieux aux lèvres.
Je ne suis pourtant pas du genre tête en l’air mais je l’avoue aisément : je perds tout !
Oui, bon, d'accord, je suis peut-être un peu désordonné...
Ce jour-là, c’était le branlebas de combat : je retournais toute l’izba pour retrouver mon bonnet. Un domovoy ne pouvait pas se permettre de sortir sans son bonnet ! Pourtant, il fallait bien se rendre à l’évidence : il ne se trouvait pas à la maison.
Baltyr, mon frère, attendait, les bras croisés, adossé à la porte d’entrée, avec une petite moue désappointée. Il en avait l’habitude, bien sûr, et je le soupçonnais d’entre être profondément agacé. Il était si soigneux, si ponctuel... Finalement, il soupira et me dit : « Allons, Lullaby, il faut y aller. En revenant du marché, nous passerons au service magique des objets trouvés. Peut-être que quelqu’un a ramené ton précieux bonnet. » Maintenant que j’y pensais, Baltyr était lui aussi un domovoy et ne portait pas de bonnet !
Il nous fallut peu de temps pour vendre la crème et le pain que nous fabriquions à l’izba et Baltyr, comme promis, me conduisit au service des objets trouvés. J’étais très contrarié d’avoir égaré mon bonnet à grelot mais cela m’ennuyait un peu de me rendre dans cet endroit sur lequel on racontait des histoires inquiétantes. Je n’en dis pas un mot à mon frère et le suivis quand il s’engouffra sous le rideau ruisselant de verdure qui bouchait la sente que nous avions empruntée.
Je restai un moment médusé. L’endroit était extraordinaire et n’était comparable à aucun autre. Sous le dais sombre du feuillage s’étalaient à même le sol des tas et des tas d’objets des plus banals comme des parapluies ou des chaussures (comment pouvait-on perdre une chaussure ?) à des choses étranges que je me serais bien gardé de toucher ! Baltyr me fit signe d’avancer et nous nous approchâmes d’un petit bureau placé au beau milieu du capharnaüm. Sur le bureau, il y avait un énorme registre et une petite sonnette dorée comme celle que l’on trouve dans les grands hôtels. Derrière le bureau, un affreux petit être rabougri était juché sur une souche d’arbre.
- Bonjour, euh, hum… Je cherche, enfin, euh… J’ai perdu mon bonnet et…
Je me tus quand je me rendis compte que le gardien tout desséché n’avait pas bougé et ne semblait pas s’intéresser à nous. Baltyr sourit et me désigna une petite pancarte posée contre le bureau : « Sonnez, s’il-vous-plaît ». Je m’exécutai et pressai le bouton de la sonnette. Je m’attendais à un « dring drelin » ou quelque chose dans ce goût-là mais en fait, c’est un piaillement assourdissant qui s’éleva, pareil à une nuée de volatiles mécontents nichés dans les fourrés entourant la clairière. Le responsable ridé battit des paupières plusieurs fois, soupira longuement puis me fixa :
- Je ne suis pas sourd, inutile d’insister comme ça ! me tança-t-il d’une voix chevrotante.
- Mais je…, non, j’ai juste… tentai-je de me justifier.
- Pas la peine de me raconter des salades, jeune garçon ! me coupa le gnome.
Baltyr pouffa derrière moi et je lui lançai un regard furieux. Il haussa les épaules et pouffa de plus belle.
Je pris une profonde inspiration :
- J’ai perdu mon bonnet, un bonnet vert pomme avec un grelot jaune. Vous aurait-on rapporter quelque chose comme ça ? demandai-je.
Le gnome prit un air inspiré qui était sans doute sa manière de montrer qu’il réfléchissait. C’était effrayant.
- Attendez là, me dit-il et il s’enfonça derrière un autre rideau verdoyant. Il en revint avec quelque chose qu’il me fourra dans les mains. Voilà ! pérora-t-il, visiblement satisfait.
Je ne sais pas ce que c’était. Ma seule certitude était que cette chose gluante, verte, et informe n’était pas mon bonnet. Mais alors là, pas du tout !
- Ce n’est pas mon bonnet !
- Qui vous a dit qu’il s’agissait de votre bonnet ? C’est un ver baveur. C’est très utile.
Je lâchais sur le comptoir la chose, un peu dégoûté.
- Et peut-on savoir à quoi cela peut servir ? questionna d’un ton intéressé Baltyr qui semblait bien s’amuser.
- Oh, à des tas de choses : à nourrir les oiseaux de feu, par exemple, ils en raffolent ; à guérir le mal des marais aussi. Là, le gnome se mit à manipuler la masse gluante et à l’étirer dans tous les sens : C’est cette petite partie qu’on utilise, on en coupe un morceau qu’on fait avaler au patient. C’est radical !
Je fis un effort de volonté phénoménal pour ne pas que cette image s’inscrive trop profondément dans ma mémoire et détournai la conversation :
- Ce n’est pas ce que je cherche…
Le gnome me regarda d’un air condescendant et me fit signe de l’accompagner. Il se mit alors à déplacer des objets tout aussi inutiles à mes yeux les uns que les autres : pommes à brume - ça mouille un peu mais c’est très pratique pour se cacher les nuits de pleine lune. Rayons de soleil en boîtes - attention, c’est chaud, me dit-il en me jetant la boîte que j’évitais de justesse. Indigo d’arc-en-ciel tressé - bonne teinture mais il faut faire attention de porter des gants, sinon, vous resterez définitivement bleu. Je me rappelle de petits lutins qui ne m’ont pas écouté et qui ont pris un bain d’indigo et sont à présent tout bleus ! Soupe de confiture de navets - excellent ! Graines de coccinelles - parfait pour venir à bout des pucerons ! Machine à feuilles de sycomore - très utile après l’hiver mais une fâcheuse tendance à multiplier les feuilles à l’automne… Purée de nuages d’orage - ne secouez surtout pas, ça pourrait éclater ! Sac de sable doré - parfait pour faire un petit somme ! Couverture en duvet de souris - ça gratte un peu et puis parfois, la couverture vous grignote les pieds pendant la nuit mais on ne peut pas tout avoir ! Echarpe de coquillages - prenez garde, ça coupe…
- Je ne vois pas de bonnet vert pomme à grelot jaune, désolé.
- Mais comment pouvez-vous être certain qu’il n’est pas dans tout ce bric-à-brac ?
- En effet, en effet, consultons le registre… Alors… b… b… Bague d’écureuil… Bas d’aurore… Bave de troll… Bêche de lutin… Bijou à gratter… Bile de saule pleureur… Bob en fibre de pissenlit… Bol de pluie d’octobre… Bonjour du matin en conserves… Bottes d’écorces taille 7.5… Hum… Non, on ne m’a pas ramené de bonnet…
Baltyr examinait avec attention un œuf de caille sculpté dans lequel brillait une perle bleue.
- Ah, très bel objet, n’est-ce pas, Monsieur ?
- Est-ce que cela permet de soigner une grave maladie ? s’enquit Baltyr.
- Ca ? Le gnome éclata de rire. Non, ça, c’est juste un œuf de nog. Cette bête est assez prétentieuse pour fabriquer le plus joli œuf qui soit… Vous le voulez ? Dans 2 siècles, vous serez l’heureux propriétaire d’un griffon qui n’aura d'autre désir que de vous dévorer ! C’est très répandu chez les nogouïs… Sans compter que la mère finira bien par se rendre compte qu’elle a perdu un de ses petits et qu’elle risque de vous dévorer avant… Mais c’est un beau cadeau, prenez, je vous l’offre…
- Euh, non, merci, sans façon… dit Baltyr en reposant précautionneusement l’œuf par terre.
- Merci beaucoup d’avoir essayé de nous aider mais de toute évidence, mon bonnet n’est pas ici, nous allons donc prendre congé.
J’inclinai la tête et me dirigeai vers la sortie, suivi de mon frère.
- Dans quoi m’as-tu enferré ? demandai-je à Baltyr.
- Au service magique des objets trouvés, tu l’as bien vu ! répliqua-t-il dans un sourire chargé de sous-entendus.
C’était surtout un endroit rempli d’objets dangereux perdus, à mon avis, délibérément par leurs propriétaires ! Plus jamais je n’y mettrais les pieds ! En attendant, je n’ai toujours pas retrouvé mon bonnet…
- Je connais peut-être un autre endroit où l’on pourrait…
- Ca ira bien, coupai-je. Je m’en passerais bien. Et puis, une autre fois, je rangerais plus convenablement mes affaires ! Cela m’apprendra !
Je ne sais pas si c’était le fruit de mon imagination mais je crus voir mon frère rire sous cape…

lundi 25 février 2008

Le clan de César...

1995.
Quelle année inoubliable ! Adieu le lycée, adieu les forêts inextricables de maths et de physique ; à nous les arts, les lettres et les lois…
On s’est rencontré dans le petit hall d’entrée de la fac, sous le bras protecteur de la grande statue de César. Toi, tu suivais des cours en auditeur libre, tu travaillais déjà. Nous, nous suivions les mêmes cours et ça avait suffit à nous réunir. Le clan était déjà indissoluble, inséparable.
Nos rendez-vous étaient toujours fixés aux pieds de César qui étendait son bras impérial vers l’escalier de pierre qui menait à la bibliothèque. Son socle accueillait même parfois des post-it qui rappelaient une heure, ou un numéro de salle.
Marginaux, nous l’étions sans conteste, gentiment, sans éclat. Te rappelles-tu ? Je te revois entrer dans le hall, ôter ton chapeau et remettre tes cheveux en place en nous cherchant du regard. Joyeuse et emportée, curieuse de tout, tu tourbillonnais ta bonne humeur tout autour de nous. Moi, j’attendais l’heure du latin, ma plaie du jeudi soir avec le beau Thierry qui nous faisait toutes craquer. Le beau Thierry pour lequel tu t’étais mise à apprendre la guitare et à écouter du Mickael Bolton ! Il y avait aussi Moussa le fantasque qui nous avait bien vite quittés pour tenter sa chance dans une troupe de théâtre à Paris. Te souviens-tu de son retour et de son arrivée en costume et chapeau claque ? Quel dommage qu’on l’ait perdu de vue ! Peut-être a-t-il réussi à atteindre son rêve d’étoile… En retrait, toujours en noir, méditait le sombre William, notre Victor Hugo à nous. Méprisant et hautain mais charismatique et probablement talentueux, il restait pour nous une énigme. Porte-t-il toujours ses cheveux de jais longs ? Ecrit-il toujours de la poésie ? Je ne saurais pas le dire…
Parfois, on croisait l’autre William, l’Ivoirien, avec ses grandes théories sur les franges qui dissimulaient forcément des secrets et son bonheur de nouveau papa qu’il nous faisait partager dès qu’il le pouvait. Je passais aussi du temps avec Harby que tu connaissais peu. Il m’avait appris à zouker et il faut avouer que c’était loin d’être gagné ! C’était aussi un excellent cuisinier qui me faisait découvrir les spécialités Djiboutiennes et avec qui je parlais pendant des heures de la poésie de Rainer Maria Rilke sans me lasser. J’ai d’ailleurs gardé le livre qu’il m’avait offert, une bibliographie du poète allemand.
J’oublie certainement des étudiants… Damien, par exemple, le si brillant élève que j'admirais tant, qui se pâmait pour sa Fanfan, je crois, et qui offrait une écoute si douce quand il le fallait. Toujours souriant, les yeux pétillants, le rire franc et joyeux.
Tu te rappelles de cet anniversaire que nous avions passé dans un parc, sur un banc, et où nous avions sorti d’un sac un gâteau pour l’anniversaire de l’un d’entre nous ? Ou le mien fêté dans la cafétéria à côté de la fac ?
Ta sœur faisait aussi partie du clan mais on la voyait moins, occupée qu’elle était entre ses cours, et son travail de restauration d’antiquité où tu travaillais aussi. Je t’accompagnais quelquefois pour humer le doux parfum de la cire et du bois et vous regarder peindre et patiner.
Et puis toi… Nous étions inséparables. Tant que tout le monde nous croyait jumelles. Nous aimions les mêmes chanteurs, terminions les phrases de l’autre, gloussions dans la rue sans nous préoccuper des regards outrés des passants. Concerts ou cinéma communs, écriture de poèmes pour moi, de chansons pour toi, et confidences sur nos amours impossibles… Toi, tu fantasmais sur un garçon que tu me faisais chercher des heures à la bibliothèque, moi, je rêvais d’un étudiant en histoire dont je ne savais même pas le nom. Pour moi, cette complicité, c’était parfois un peu trop, et j’essayais de te faire comprendre mon tempérament de chat indépendant. Un jour, nous ne sommes plus entendues sur ce point et nous nous sommes échangé des mots sourds et démesurés. Nous ne nous sommes plus vues. C’était absurde. Tu m’as écrit une lettre. Je n’y ai pas répondu. Oh, ce n’est pas que je ne le voulais pas mais mes parents étaient en plein divorce et en déménageant, j’ai perdu ta lettre et ton adresse… Je ne t’ai plus croisée et je n’ai pas pu réparer…
Le temps a passé. 10 années ont ensablé nos premières années de fac, les recouvrant de conformisme, d’un travail, d’une famille… Je me demande bien ce que vous êtes tous devenus, toi spécialement, Françoise. Un jour, alors que je flânais Rue de la République, j'ai bien cru te croiser, mais le regard clair était durement fixé sur un point à l’horizon et tu étais accompagnée… J’ai hésité et, finalement, me suis dit que non, ce ne devait pas être toi… Sais-tu jouer de la guitare aujourd’hui ? As-tu trouvé ton prince charmant ? Es-tu heureuse ? Qui pourrait le dire ? Le clan s’est délité au fur et à mesure que nous nous spécialisions… et de maîtrise en école des maîtres, nous nous sommes tous perdus de vue. Moussa est peut-être devenu un comédien de talent. William a peut-être été publié. Thierry est sans doute marié. Damien aura certainement rejoint le corps enseignant et doit prodiguer la "substantifique moëlle" à des ados récalcitrants. Ta sœur a probablement réussi son concours d’entrée à l’école des Beaux-Arts et enseigne à de jeunes fous de notre trempe. Les autres ont regagné leur pays, diplôme en poche…
Moi, j’ai gagné ma paix. J’ai fini par devenir prof, c’était mon but, je n’ai pas failli. Moi qui jurais mes grands-dieux que non, jamais je ne m’engagerais, je me suis mariée ! J'écris toujours mais plus de contes pour enfants que de pamphlets! Je ne passe plus mon temps libre à refaire le monde, à parler littérature ou à imaginer ma vie... Et oui, tu serais bien surprise de la petite vie tranquille et sage que j'ai adoptée!
Mais j’aimerais bien te retrouver, te dire que ce jour-là où je ne suis pas venue te rejoindre à la fac, c’est parce que j’avais raté mon bus et que, joie de la jeunesse, je n'avais pas de voiture pour te rejoindre. J’aimerais bien te dire que tu m’as beaucoup manquée et me manques encore et que j’irais bien déjeuner de quelques tapas dans notre gargote préférée… On pourrait boire un thé pour retrouver les jeunes filles fleur bleue et fantaisistes que nous étions… Peut-être bien qu’un jour… Pourquoi pas ?

Si tu passes par là, donne-moi des nouvelles…

vendredi 18 janvier 2008

LES FEES N'EXISTENT PAS?

Regardez mieux... Regardez ailleurs... Regardez différemment...















LISBETH LA FEE ET EPHAËL L'ELFE

Ephaël l’Elfe et Lisbeth la Fée s’aimaient profondément. Leur mariage était prévu pour le solstice d’été et le peuple magique au complet était en liesse et préparait cet événement qui scellerait la première alliance magique.

Mais un sorcier, un puissant sorcier venu du monde des humains, le maudit Yarak, était venu du monde des humains pour voler la magie de Féerie, en priver les hommes et ainsi, devenir plus fort et puissant dans son monde. Personne ne sait comment il avait découvert les atroces secrets pour s’emparer de la magie des êtres du petit peuple mais, en tout cas, il y avait assez d’horreur en lui pour les mettre en pratique. Et les fées étaient ses premières cibles car il lui était très facile de leur dérober leurs pouvoirs. Il attrapa Lisbeth car les êtres magiques n’étaient pas méfiants et se fiaient à la paix de leur monde. Il paraît qu’elle était en train de coudre une à une les fleurs d’opale sur son voile de mariée quand il abattit sa main osseuse sur elle. On trouva des fleurs d’opale disséminées sur des lieues… La légende dit que ces fleurs ne fanent jamais depuis. Je les ai vues, ces fleurs…

Yarak emporta Lisbeth dans son monde et il lui déroba sa magie de la manière la plus ignoble qui soit : il lui arracha les ailes. Il lui arracha les ailes et on dit qu’il les cousit avec les autres sur sa cape de voyage… On dit que de loin, le chatoiement des ailes de fées faisait penser à une aurore boréale…

Lisbeth perdit ses pouvoirs mais ne mourut pas. Une fée sans ses ailes ne perd pas son immortalité. Elle vit son agonie pour l’éternité…

Quand Ephaël revint de la forêt des Elfes où il avait préparé les fêtes du Solstice et qu’on lui révéla ce qui était arrivé à sa fée, il tomba à genoux et pleura sans pouvoir ni prononcer un mot, ni se relever. Il pleura longuement avant d’écouter les conseils de son cœur qui lui rappelaient que Lisbeth avait besoin de lui plus que jamais. Quand enfin il fut disposé à l’écouter, il sut ce qu’il devait faire. Il endossa sa cape de voyageur et porta à sa bouche la flûte dorée au timbre cristallin que chaque elfe reçoit en cadeau le jour de sa naissance. Il marcha sans but, marcha et marcha encore, ne cessant jamais de jouer sa petite musique. Ceux qui le croisaient pensaient qu’il avait perdu la raison car il ne parlait jamais, ne prenait jamais de repos et jouait, jouait encore la même petite musique. On dit que son regard troublé semblait voir ce que personne ne voyait… Il cherchait Lisbeth. Il cherchait sa bien-aimée et ne cessait de jouer de la musique pour endormir le chagrin qui l’aurait contraint de s’arrêter. Il se laissait guider par les notes et par ses pas, certain que son amour le porterait vers Lisbeth.

Et il finit par la retrouver. Il vit son aimée, évanouie, petite chose inanimée, transie, petite poupée avec laquelle on ne veut plus jouer, à même le sol en terre battue. Il vit le sorcier qui fabriquait, dans un coin, sans s’inquiéter, des maléfices. Alors, il se remit à jouer de la flûte pour Lisbeth qui leva péniblement la tête vers lui. Puis il ôta sa cape qui tomba à terre.

Les elfes sont les plus pacifiques des êtres magiques qui vivent et règnent sur Féerie. Ils ne tolèrent aucune forme de cruauté et même s’ils possèdent des armes, ils ne s’en servent jamais. Mais leur colère est terrible et rien ne peut l’arrêter. On dit que le combat que livra Ephaël fut si violent que les bois en résonnèrent des jours entiers. Yarak s’opposa à l’elfe par tous les maléfices qu’il connaissait et quand il vit qu’il ne triompherait pas, il tenta de fuir. Mais Ephaël eut raison de Yarak. Un bref instant, le elfe noble eut le désir de jouir de sa souffrance jusqu’à la mort. Et Ephaël eut alors peur de lui-même, peur de ce que la colère et la douleur faisaient de lui. Il recula de quelques pas, ferma les yeux et réunit toute sa magie pour envoyer Yarak loin de lui, dans les territoires effroyables du Versant obscur. Yarak fut réduit à l’errance, à la solitude et à l’amnésie. Les peuples elfiques chantent encore la fuite du sorcier et son éternelle punition.

Ephaël emporta Lisbeth délicatement et l’emmena sans tarder au cercle des fées, leur royaume. Il la confia à ses sœurs qui gémirent de douleur en les voyant arriver. Lisbeth avait perdu ses ailes et sa douleur était si grande qu’elle n’avait plus conscience de ce qui l’entourait. Les autres fées ne savaient que faire et pensaient sans oser le dire qu’il n’était pas possible de garder en vie une créature si abîmée car la petite fée, en perdant ses ailes, avait perdu son rang de fée. Ephaël dut comprendre ce que les sœurs de son aimée taisaient. Il les supplia de faire ce qu’elles pouvaient, le visage ruisselant des larmes qu’il avait empêché de couler durant toutes ses recherches. Les fées emportèrent alors Lisbeth et l’installèrent dans un cocon de soie tissée. C’était tout ce qu’elles pouvaient faire. Les Esprits de la Nature se succèdèrent auprès d’elle et déployèrent tous leurs talents magiques pour tenter de la soulager mais tous venaient la tête baissée, certains que rien ne pourrait empêcher la petite fée d’abandonner la lutte en choisissant de rejoindre les étoiles du firmament. Ils avaient essayé d’en sauver tellement et chacune d’entre elles avaient fini par devenir une petite lueur poudrée fusant vers le ciel.

Alors, Ephaël s’assit à côté du cocon et reprit sa flûte. Sa musique, déchirante mais si douce, emplit la nuit de la forêt. Pendant des jours et des jours et des jours encore, il refusa de s’éloigner, de prendre du repos ou de s’alimenter et à aucun moment, il ne cessa de répandre sa mélopée. Ce que son regard troublé ne voyait pas, les fées, elles, s’en étonnèrent : le cocon s’enflait, grossissait, semblait se transformer en chrysalide.

Un matin, très tôt, Ephaël se tut. Le silence profond remplit l’air frais et tous les êtres du petit peuple vinrent voir ce qu’il se passait. Son chagrin, son désespoir, la douleur qui le tenait avaient eu raison de lui : il abdiquait... Il ferma les yeux et dut s’assoupir. Alors, une chose extraordinaire se produisit. Le cocon bougea, se fendit et l’air embauma soudain le lilas. Et la musique reprit. La musique reprit alors que la petite flûte gisait sur le sol. Ephaël ouvrit aussitôt les yeux et crut que sa grande fatigue lui jouait un tour : devant lui, se tenait Lisbeth, Lisbeth qui avait grandi, Lisbeth sans ailes, Lisbeth souriante et sereine, Lisbeth qui n’était plus tout à fait une fée.

Une liesse folle se répandit dans les bois. Une pluie de fleurs d’opale tomba, des rondes et des sarabandes s’organisèrent et les rires venaient de partout. Lisbeth et Ephaël célébrèrent leur union et ce fut la plus belle et la plus joyeuse des fêtes de Féerie. Longtemps, longtemps, on parla des noces de l’elfe et de la fée. Des chants et des légendes parlent encore d’eux. « Ecoutez la belle histoire de Lisbeth et d’Ephaël ! » entendrez-vous dans les forêts pleines de secrets si vous tendez l’oreille…

La flûte d’Ephaël a disparu, l’elfe la donna à son aimée le jour de leur union. La légende dit qu’elle se transmit de fée en fée puis de fée à femme… On dit même que la flûte d’Ephaël peut retrouver tous ceux qui se sont perdus... Mais seules les descendantes des premières fées savent l’endroit où elle est gardée cachée…

jeudi 17 janvier 2008

ETOILE DU NORD

Qui que tu sois,
Où que tu ailles,
Laisse tes failles,
Si tout déçoit,
Suis une étoile.

Contre le vent,
Contre la peur,
Prends l’atout cœur,
Dorénavant,
Suis-la, l’Etoile.

Quand ils en rient,
Quand tu en pleures,
Vains persifleurs
Qui contrarient,
Suis bien l’étoile.

Si tout s’écroule,
Si tout te nuit,
Seul dans la foule,
Vois, elle luit,
Suis, suis l’étoile.

Même en péril,
Même aux abois,
Jette mort-bois,
Oublie l’exil,
Suis cette étoile.

Pour résister,
Pour tout construire,
Ou pour détruire,
Pour exister,
Suis ton étoile.